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Pseudo-traduction d’un poème slovène
Poème original
Štirje veslači v noč gredó
v noč gredó, strašno pojó
in bijejo z vesli v temni val
in kličejo : Pridi, pridi, kralj !
Štirje veslači gredó skozi noč :
Pridi, ga kličejo, na pomoč,
ali reši v Evropi nas,
ali pa v strašnost potopi nas !
Ali rešitvene zvezde ni,
v njihovih očeh ni več oči,
v njihovih očeh le še ogenj gori,
ubija in v smrt združuje ljudi.
Štirje veslači v noč gredó
v noč gredó, strašno pojó
in bijejo, kličejo a zaman.
Tih je nad mrtvimi ocean.
Courbe voilée
Courbe voilée dans la nuit progressive
Dans la nuit progressive, état languide
Dans le bifide la vigueur le terminal
Dans le perfide : Prédis, prédis, un râle !
Courbe voilée nuit progressive en écho :
Prédis, donc perfide, plantée bien haut,
D’autres s’en vont vers l’Europe, là,
D’autres restent sur le sol natal, là !
D’autres ne savent plus comment ils se démènent,
Là où nul n’habite ni aucune vie ne mène,
Là où nul n’habite sinon les indigènes,
Ubiquité où se déroulent d’étranges scènes.
Courbe voilée dans la nuit progressive
Dans la nuit progressive, état languide
Dans le bifide, le perfide se rassemblant
Jusqu’à pouvoir atteindre l’océan.
La pluie tombe sur nous
La pluie tombe sur nous, que d’eau !
Sur nous, que d’eau, la rue est un ruisseau.
Sur mon vélo je vais, je tente d’aller
À bicyclette : je pédale, pédale, mouillé.
La pluie tombe, que d’eau s’abat sur nous !
Je pédale à bicyclette jusqu’à chez vous.
Là je me poserai, malheureux Estropié ;
Là, courant les rues, malheureux va-nu-pieds.
Là je résiderai et je ferai mon nid,
Je me pelotonnerai au sec près de vous à l’abri,
Je me pelotonnerai au sec, me sentirai ragaillardi,
Youpi ya ! c’est smart d’être chez toi jusqu’à jeudi.
La pluie tombe sur nous, que d’eau !
Sur nous, que d’eau, la rue est un ruisseau ;
Sur mon vélo, à bucyclette ton bel amant,
Je me sens prêt à traverser l’océan.
Étire avec vélocité tes gammes
Étire avec vélocité tes gammes de ré à do,
de ré à do, ô étrange banjo
sur tes bizarres et vives cordes de métal
nos doigts, vite, vite, s’étalent.
Etire avec vélocité tes gammes pas en toc
Vite, nous glissons comme glace sur roc
En notre pauvre Europe, hélas,
nos étranges tempi passent.
Ainsi, résignons nous à être bannis,
annihilés, rossés et nivelés aussi
annihilés, rossés, restant sans euphorie,
oubliés dans ces innommables lieux-dits.
Etire avec vélocité tes gammes de ré à do,
c’est notre credo, ô étrange banjo,
et sur ton bizarre doigtier ottoman,
je nage, mon intime océan.
Plaisir en mer
Je tire sur la voile et gronde le vent
Et gronde le vent, peu de nuages
Dans le ciel il vole et s’étire au loin
Les enfants crient : attention, attention cachons-nous !
Je tire sur la voile malgré le vent qui gronde
Attention les enfants ont peur
Ici, je revis et Elodie scintille
Ici, passent et s’étalent les vagues scintillantes
Ici, se déchaînent en force les éléments
A chaque bord tiré nous sommes envoûtés
Et chaque bord tiré nous éloigne de la terre
Nous jouons et la vitesse nous grise
Je tire sur la voile et gronde le vent
Et gronde le vent, peu de nuages
Une bonne bière et un hareng salé
Nous mettent en joie au milieu de l’océan
Coq en cocotte
Je prends une grosse cocotte
Et la cocotte accueille un beau coq
Dans la cuisine les saveurs s’exhalent
Les invités crient : bravo, bravo, trinquons !
J’amène la cocotte, les convives enthousiastes
Bravo, répètent-ils affamés
Ici, c’est une réunion Européenne
Ici, pas de chichis de nationalités
Ici, pas d’interdits alimentaires
Pas de végétariens ou autres végans
Pas d’allergie au gluten ou au lactose
On mange tout ce qu’on vous propose
Je reprends la grosse cocotte
Où la cocotte a cuit un beau coq
Maintenant elle est vide, en son honneur
Chacun se dresse sur son séant
Traduction « libre » du poème du slovène Srecko Kosovel (1904/1926) Tragedjia Oceano.