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Oscarnage
— Tu vois le type là-haut ?
— Le petit joufflu sur le chemin de ronde ?
— Oui. Lui, c’est Oscar, le capitaine. Et celui qui regarde à la fenêtre c’est Simon, le sous-chef.
— Et les autres, ils sont où ?
— Quels autres ?
— Les autres défenseurs du château.
— Il n’y en a pas d’autres. Oscar et Simon, c’est tout.
— Tu te fous de moi ? Ils ne sont que deux pour défendre le château ?
— Ne dis pas qu’ils ne sont « que » deux. Ils sont deux, oui.
— Et nous, on nous donne mille hommes pour assiéger un château avec deux défenseurs ? Tu crois vraiment que je vais gober un truc pareil ?
— Écoute, tu es nouveau dans le secteur, tu ne peux pas comprendre. Fais-moi confiance, tu vas vite changer d’avis.
— N’importe quoi. Vous êtes en train de me bizuter, là, c’est ça ?
— Inutile de discuter, tu verr... Attention ! Alerte ! Tout le monde à terre ! Casques et boucliers en position !
— Mais qu’est-ce qui te prend de hurler comme ça ?
— À terre, je te dis ! Ils ont sorti la catapulte !
— Ça y est, ils tirent. Ouh là, mais c’est dingue ! Avec quoi ils nous bombardent ?
— C’est toute la question. On n’a jamais réussi à le savoir.
— En tout cas c’est foutrement efficace. Ils ont déjà écrabouillé la moitié de nos troupes.
— Et ça ne fait que commencer...
— Attends, je vais répliquer, tu vas voir.
— Tu es fêlé ! Reste couché si tu tiens à ta peau.
— Regarde, je l’ai touché ! Celui qui était à la fenêtre. Je l’ai vu se tenir le bide et s’écrouler. On ne le voit plus.
— T’en fais pas pour lui, dans une minute il sera sur pied.
— Avec un carreau d’arbalète dans l’estomac ? J’aimerais bien voir ça. Moi je te dis qu’il est en train de crever au milieu de son sang et de ses boyaux.
— Tu paries ? Compte jusqu’à dix, juste pour voir.
— Un... deux... trois... quatre... Merde, tu avais raison ! Le voilà qui déboule sur le rempart à côté de l’autre. Mais c’est pas possible, comment il fait ça ?
— Si on te le demande, tu diras que tu n’en sais rien. En attendant, ils doivent être furax. Il ne manquerait plus qu’ils fassent une sortie avec leurs épées.
— Tu crois qu’ils peuvent faire ça ? On est quand même encore au moins cinq cents à les cerner.
— Ben tiens, ils vont se gêner. Regarde, qu’est-ce que je te disais : les voilà qui rentrent dans la tour. Dans trente secondes ils vont sortir par la grande porte et nous tomber dessus.
— Qu’est-ce qu’on fait ? Un repli stratégique ?
— Attends, on peut tenter un dernier truc : on lâche le dragon. Je n’y crois pas trop mais on n’a rien à perdre.
— D’accord, mais fais vite. Oh, il est déjà là ! Quel monstre, heureusement que je sais qu’il est à nous, sans ça...
— Regarde, même eux il leur fait peur ! Ils rentrent dans le château. On est sauvés, au moins pour cette fois.
— Qu’est-ce qu’ils vont faire maintenant ?
— Aucune idée. Ah si, tiens, les voilà qui sortent dans le mâchicoulis juste au-dessus de la porte.
— Ils vont jeter de l’huile bouillante ou de la poix fondue sur notre dragon ?
— Là, ils peuvent toujours essayer. Ils nous ont bousillés tous les précédents comme ça, mais celui-ci c’est un mutant, ça ne lui fera rien.
— Je ne sais pas ce qu’ils lui balancent, ça ne ressemble pas à de l’huile ou de la poix. Oh la la, incroyable, le dragon ne bouge plus ! Complètement neutralisé.
— À tous les coups, c’est encore leur saleté de potion magique.
— Ah, parce qu’ils ont une...
— Oui, on a essayé par tous les moyens de trouver avec quoi ils la fabriquent, mais rien à faire. La seule chose qu’ils se font livrer au château, c’est des fraises.
— Ils font une potion magique avec des fraises ?
— L’apothicaire prétend qu’ils ont aussi une épice spéciale, une espèce de gousse noirâtre qui viendrait d’un pays inconnu au-delà des mers. Mais je n’en crois pas un mot, il dit ça pour se rendre intéressant.
— En attendant, c’est pas encore aujourd’hui qu’on prendra le château. On se rentre ? J’ai une de ces faims, je mangerais bien quelques biscuits.