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Le bistrot oulipoète
Je regarde la liste oulipo : quel drôle de bistrot lumineux clair comme un smog londonien ! On ne lit jamais ce que l’on a commandé, et d’ailleurs, glauque clarté oblige, on ne peut rien commander du tout ! Voyez ces pangrammes minimalistes qui vous crèvent les yeux, ces palindromes qui vous fissurent l’esprit par le milieu et vous vous demandez soudain ce qui rampe là l’un vers l’autre dans vos yeux vos esprits : s’agit-il d’un sens présumé qui cherche désespérément sa forme ? Épuisés par cette question laissée sans réponse, si l’ennui vous prend pendant que le jour se casse, récitez un sonnet offert par la maison à rimes de Cauchy convergentes et dont la gématrie de chaque vers est un nombre de Queneau : vos lèvres sèches lampent déjà la musique qui explose de cette boisson forte et vous croyez voir deux yeux jolis comme mer de possibilités là devant vous… L’art n’est qu’illusion comme l’a dit un autre membre parti sans laisser de pourboire ! Ces deux yeux jolis, vous les voyez de plus en plus distinctement, vous croyez les entendre comme ceux d’un ténébreux barman à tête d’ange sorti d’un Desdichado, ils vous fixent et ils vous disent alors vous ce sera quoi ? Et votre esprit subjugué répond : ce sera pour l’instant juste boire le bleu d’un sonnet - géométrique à rimes projectives dans un espace riemannien - par tes yeux ton regard ton visage dans la mer de choses possibles là où on nage.