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C’est l’un de ces soirs...
C’est l’un de ces soirs où le vent, excité par le tonnerre, semble mugir un air symphonique que jouent des cordes sauvages, rythmé par des impacts de grosse caisse sous une pluie surplombante. Assise sur une bergère, la tête penchée, Emma est plongée dans la lecture d’un pastiche de roman picard du siècle dernier assaisonné de scènes d’amour bourgeois, « Les maux de Urlevent ». Au dehors c’est une orgie de sons et de lumière barbares, le ciel blêmit à chaque éclair précédé d’une déflagration de tonnerre roulant comme un tambour, avec une pluie qui change de cadence à chaque nouvelle mesure. Par le cadre de sa fenêtre au vieux bois vermoulu, s’infiltrent de minces filets de pluie aux reflets d’argent que le vent pousse en assauts répétés, comme un bélier entre les mains de légionnaires romains. Emma soupire : oui, pense-t-elle, l’amour doit arriver tout à coup, avec de grands éclats et des fulgurations, ouragan des cieux qui tombe sur la vie, la bouleverse, arrache les volontés comme des feuilles et emporte à l’abîme le cœur entier.
Harry Faublair, « Emma Bove a ri »