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À Bourges ? Zut !
Abreuvoir policé au centre de la France,
Bar au comptoir brillant qui manque d’affluence,
Cabaret éclairé, lumière en évidence,
Débit où notre esprit l’un vers l’autre s’avance,
Estaminet peut-être, on y entre et on rampe,
Fissuré par le smog londonien ; j’ai la crampe.
Guinguette pour nos yeux l’un vers l’autre pressé,
Haletants, assoiffés, et le jour s’est cassé,
Instant parfait : nous sommes seuls. L’autre impoli
Justement est sorti sans laisser de pourboire.
Knock down, barman déçu veut nous servir à boire.
Lèvres sèches, je lampe dans tes yeux jolis.
Mais le barman insiste et nous prend en otage.
Nous ? Devant nous, tout est possible, et ton visage
Offre à mes yeux le bleu de tes yeux, et je nage
Pour te rejoindre dans la mer de mon mirage.
Quand je regarde ce bistrot, quand ton regard
Reste fixé sur mon regard, l’esprit hagard
Sent que tout est possible et que la mer est grande,
Tes yeux me font nager de Bourges vers l’Irlande,
Un barman ne peut pas empêcher notre rêve.
Voici que nous lampons la musique, sans trêve :
Whisky tintant sous les glaçons au fond du verre,
Xérès tombé ici, arrivant d’Angleterre,
Y a-t-il autre chose pour nos yeux crevés ?
Zélé, je bois, tu bois, nous sommes arrivés.
Extrait de L’Abécédaire d’Alcatraz à Zanzibar d’Aliénor Zazie, in Absolu Zéro, L’Alcoolo qui zigzague, 2014.