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La maliette de Schrödinger
État des maliettes, pensa Schrödinger. Qui étudiera leur état physique ? Qui osera le décrire ? Il faudrait : 1°) une grosse boîte, 2°) un réservoir d’eau-forte prêt à être brisé par un marteau, 3°) un arrache-cœur, 4°) puis y coucher une maliette sur un papier ultra-sensible muni d’un dispositif automatique de détection de la moindre désintégration d’un atome de ses plumes impalpables. On pourra approfondir ses potentialités de deux états équiprobables : 1°) vivante, tendre et subtile, 2°) morte d’avoir été touchée, frôlée, regardée, moquée, négligée, confrontée au noir de l’enfermement dans cette boîte obscure. Et qui verra si sa couleur de suie et son poitrail rouge perdurent ? Qui entendra d’éventuels cris légers de petites souris ? Puisque le cœur des maliettes occupe toute la place où les autres bêtes logent des organes banals, faisons l’expérience avec un chat. Qu’il soit vivant ou mort, de toute manière, tant qu’il sera dans la boîte, il ne mangera pas de maliette.
Texte inspiré de l’expérience de pensée du chat de Schrödinger.