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La maliette au tribunal des flagrants délires

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Fin d’un réquisitoire inédit de Pierre Desproges

« ... Ah Dieu me tripote ! N’y allons pas par quatre chemins mon cousin : la maliette est coupable ! En effet, Mesdames et Messieurs les jurés, pouf, pouf, prenons une maliette de corpulence moyenne, une Dupont Durand de la maliette, allongeons-la, que voyons-nous sous nos yeux ébahis ? Certes une couleur de suie, un poitrail rouge, un œil de lune, sans parler ici et là de ses appas, je vous dis pas, mais je m’égare, et pas seulement de Montparnasse ! Oui la maliette est belle, j’en conviens, mais qui ne voit, derrière cette joliesse apparente, ces minauderies cucuteuses, une noire perfidie sournoise si bien planquée que le bon vieux Sigmond ne verrait que couic ? Et le bec agressif ? Et les griffes acérées capables d’inoculer un venin fatal au frêle touriste jambes nues visitant dans son élégance sobre et racée le paysage bucolique d’une région classée haut de gamme dans sa population animalière étrange et intrigante ? Qui ne voit cette férocité, hormis son avocat le plus bas d’inter fleurant fort la morue que sa tata Ramirez lui envoie régulièrement en paquets fados ? Quant à moi, maliette je te plumerai ? Non, maliette je te coupe la tête ! »

Les flagrants délires du 18 juillembre 1982.