Accueil L’oulipienne de l’année Diomira, une ville invisible
Rêve antonymisant

Page précédente Page suivante

Sans bouger, retenue à trois nuits du couchant,
une femme se cherche à Diomira, rase campagne sans
la moindre antenne parabolique de fer-blanc, sans
êtres faits de chair et d’os, sans sentiers battus
d’airain - pas de soap opera, pas de poule aux
yeux mouillés qui pleure le soir au fond des
oubliettes. Cette laideur nulle, notre dormeuse l’ignore
car elle échappe toujours au regard au même
endroit. Ici, pas plus qu’ailleurs, nul ne s’en va
tous les jours au printemps, ni ne s’allongent les
nuits, ni ne disparaissent de ternes crêpons
crevés, l’un après l’autre au fond du grand
restaurant étoilé - et, sous le balcon, nul Romeo
muet ne murmure : aïe ! Nul ne part méprisant
celle qui, hier ou demain, oubliera qu’elle n’est
pas encore morte un autre matin, sans avoir été,
pour le reste du temps, déçue.

Othalie Colvani - « La campagne, bien entendu »,
éd. La porte arrière, reconstitué directement en
français par votre serviteur