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Les chenilles à soie (sonate)

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Les chenilles à soie murmurent dans la mûreraie
elles ne mangent mie ces mûres blanches et molles
pleines d’une mélasse qui ne fait goutte d’eau-de-vie
les chenilles à soie qui sont patientes et douillettes

mastiquent les feuilles avec des tonalités mouillées
cette musique les endort mais tout autour de leurs épaules
elles tissent une enveloppe ronde aux deux extrémités
avec une fibre de bave, puis dorment rassurées

En la dévidant des femmes tirent une fibre de soie
dont elles font pour une belle dame une robe
belle également qu’elle porte avec allure

Quand la dame meurt d’autres femmes enterrent la soie
avec elle et plantent, sur sa tombe à la Toussaint,
une mûreraie où sans fin les chenilles à soie murmurent.

Jacqueline Roubaude

Poème non-mixte