Accueil L’oulipien de l’année Chanson des rues
Caradec et Descartes

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Prenez une rue au hasard

Cela ne se peut. Tout effet a une cause, et pour sortir dans la rue, il faut une impulsion de la volonté qui en est la cause. L’objet des études de rues doit être de diriger ses pas vers ce qui se présente afin d’énoncer des jugements solides et vrais à leur endroit.

en sortant de chez soi la première est la bonne

Il ne faut s’occuper des rues que de celles dont notre esprit paraît pouvoir atteindre une connaissance certaine et indubitable.

ce n’est pas un effet de l’art

Cela est évident. Une œuvre d’art est faite de la main d’un seul, et les bâtiments des rues sont le plus souvent raccommodés à plusieurs et n’ont donc pas la perfection d’un bâtiment entrepris et achevé par un architecte. Ainsi ces anciennes cités qui, n’ayant été au commencement que des bourgades, sont devenues par succession de temps, des grandes villes fort mal compassées. L’arrangement des édifices, ici un grand, là un petit, rend les rues courbées et inégales, on dirait que c’est plutôt la fortune, que la volonté de quelques hommes usant de raison, qui les a ainsi disposés.

la plus belle à Paris est celle qu’on fredonne.

Chacun pense parcourir le boulevard du bon sens à son avantage, étant persuadé qu’il est la chose du monde la mieux partagée. Mais ce n’est pas assez d’avoir l’esprit bon, le principal est de l’appliquer bien, c’est pourquoi la rue de la Méthode est la plus belle qui nous conduit directement à la beauté et à la vérité des choses que nous rencontrons. Il faut chanter la rue de la Méthode.

Toutes les rues riment ainsi

À la condition d’effectuer une mise en ordre et de bien disposer les rues vers lesquelles il faut tourner le regard de l’esprit pour découvrir quelque vérité. D’un labyrinthe complexe, nous réduisons par degrés les rues les plus tortueuses afin d’aboutir à des rues simplement droites.

on en fait des refrains qu’on chante dans les rues

Ces refrains sont les lignes méthodiques qui partent des rues les plus simples pour remonter aux autres et déterminer ainsi leur degré d’éloignement par rapport à elles.

toutes les rues disent merci

Les rues disent merci lorsqu’on les a passées en revue dans leur totalité et une par une, d’un mouvement continu et absolument ininterrompu de nos pas, afin de les embrasser en une énumération suffisante et ordonnée.

merci d’avoir chanté la ville disparue.

Si, dans la série des rues de notre recherche, il s’en présente une dans laquelle nos pas ne peuvent nous conduire, nous nous arrêterons là et dirons que la ville est disparue.