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Sosnet
Voici le sosnet tel que son inventeur Nicolas Graner le présente.
Un sosnet est un sonnet composé de sos.
Un sos (prononcer "sosse") est un vers de douze syllabes dont la structure s’inspire de celle du SOS en morse : trois mots d’une syllabe, trois mots de deux syllabes, trois mots d’une syllabe.
(Rien à voir évidemment avec le mot "sos" signifiant "tambour" en holikachuk, qui est comme chacun sait une langue athabascane.)
Le décompte des syllabes du sos se fait selon les règles habituelles de la prosodie, plus ou moins strictes selon le classicisme de l’auteur. Les mots de zéro syllabe (mots élidés) ne sont pas comptés comme des mots et peuvent donc être utilisés librement.
Un sos n’est pas un alexandrin, puisqu’il ne peut pas avoir de césure après la sixième syllabe. Le sos le plus traditionnel est césuré 3/6/3, ce qui lui donne un rythme qui n’est pas sans évoquer le haïku :
ta, ta, ta.
tata, tata, tata.
ta, ta, ta.
mais on rencontre bien d’autres variantes : 3/9, 9/3, 5/7, 7/5, voire pas de césure du tout.
L’usage du sos n’est pas restreint au sosnet, il remplace avantageusement l’alexandrin dans tous ses emplois. Voici des versions sossées de quelques vers célèbres :
Ô, rage ! Ô malheur ! Triste rigueur du grand âge !
Me faut-il avoir autant vécu pour voir ça !
Je m’en vais demain avant l’aube vers ta tombe.
A noir, E laiteux, Y carmin, U vert d’eau,
O bleu, je dirai comment jadis tu es né.
Il dort bien tranquille avec, côté droit, deux trous.
Si tu crois xava durer toujours, tu te goures.
À vous de jouer...
Pour exemple, le premier sosnet de l’histoire de la littérature mondiale, composé par Nicolas Graner :
L’air est doux. Aucun souffle. Moiteur de la nuit.
Goût de sel iodé. Odeur âcre. Tout est sombre.
Dans le ciel une fine brume tend son ombre.
Sur le dais obscur l’astre brillant du soir luit.
Sûr de lui, l’ample navire altier fend la mer.
Nul ne peut fléchir cette route qu’il doit prendre.
Droit au cap, une seule règle. Rien de tendre
Dans ses mâts, quille, coque, soutes, ponts de fer.
Maître à bord — selon l’adage — après Dieu, un homme
Dort. Deux mille autres aussi, confiants en lui, comme
Dans des bras aimants, l’enfant fragile aux yeux clos.
L’air est calme. Aucun signe. Pourtant dans une heure
Plus un ne vivra. Cela suffit pour qu’on meure,
Un mont de glace mouvant tapi sous les flots.